Faut-il déposer sa marque en classe 35 pour la vente au détail ou la publicité ? 

Choisir les classes et rédiger le libellé sont les clés d’un dépôt de marque réussi. Certaines formulations de la Classification de Nice laissent perplexe les entreprises. Ainsi, de nombreux clients s’interrogent sur la nécessité de protéger la classe 35 pour le service de vente des produits. Le cabinet De Baecque Bellec, gestionnaire de nombreux portefeuilles de marque, fait le point. 

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Pas de dépôt en classe 35 pour vendre ses produits ! 

Le dépôt d’une marque confère à son titulaire un droit exclusif d’exploitation du signe dans la vie des affaires. Ceci inclut la vente des produits protégés et revêtus de la marque. 

Le droit d’exploitation comprend notamment la reproduction, l’apposition, l’utilisation, voire la suppression de la marque pour les produits ou services désignés lors du dépôt, ainsi que la vente, l’offre à la vente et l’importation des produits portant cette marque. 

Une entreprise de luxe qui commercialise des sacs (classe 18) et des vêtements (classe 25) a pour objectif nécessairement de les vendre.

Par son célèbre arrêt Arsenal rendu le 12 novembre 2002, la CJCE (Cour de justice de la Communauté européenne) précise que l’acte de vente est un usage dans la vie des affaires. “En l’occurrence, l’usage du signe se situe en effet dans le cadre de ventes à des consommateurs et n’est manifestement pas destiné à des fins purement descriptives”. 

D’ailleurs, la classification de Nice ne prévoit pas la vente comme un service en tant que tel. En effet, la classe 35 se réfère plutôt aux différentes formes de vente, telles que la vente au détail ou la vente en gros. Il suffit de se référer à la note explicative de la classe 35 : “pour les besoins du classement, la vente de produits n’est pas considérée comme un service”.

En conclusion, nul besoin d’ajouter la protection de la classe 35 pour s’arroger le droit de vendre ! La vente est inhérente à l’exploitation de la marque

Dans quels cas déposer une marque en classe 35 ? 

Mais alors à quoi correspondent les services de la classe 35 ? Cela vise plusieurs services dans son libellé général “publicité, gestion des affaires commerciales, administration commerciale, travaux de bureau”.

La Cour de Justice de l’Union européenne (CJUE) définit de manière précise la vente au détail : elle inclut au-delà de l’acte juridique de vente, toutes les démarches entreprises par le commerçant pour inciter à la conclusion de la vente, telles que la sélection d’un assortiment de produits et l’offre de prestations visant à persuader le consommateur d’acheter auprès du commerçant plutôt qu’auprès d’un concurrent (Arrêt Pratiker, CJUE, 7 juillet 2005). 

Le service de vente au détail est donc fréquemment déposé par un commerçant qui vend les produits d’un tiers, et non par un commerçant vendant ses propres produits.

Par exemple, la vente de bouteilles de vin produites par un vignoble ne nécessite pas une protection en classe 35 mais une protection des produits (“vin”) en classe 33. En revanche, si une entreprise vend les produits de tiers, il convient d’ajouter le service de vente au détail en classe 35 en précisant les produits vendus. 

L’INPI exige d’ailleurs d’indiquer clairement dans le libellé de la marque, les produits faisant l’objet de la vente au détail. Les conseils d’un avocat en propriété intellectuelle s’avèrent précieux pour bien sélectionner les classes de produits et définir le libellé de marque adéquat. 

La classe 35 pour les services de publicité ? 

Le dépôt de services en classe 35 suscite également des interrogations pour les services de publicité. Deux décisions récentes du Tribunal de l’Union européenne (TUE) en témoignent. La déchéance des marques AIRBNB et RTL pour les services de publicité était demandée. 

Le Tribunal approuve la définition des services de publicité proposée par l’EUIPO (Office européen de la propriété intellectuelle) : “offrir à d’autres entreprises une assistance dans la vente de leurs produits et services en assurant la promotion de leur lancement et/ou de leur vente, ou à assurer le renforcement de la position des entreprises clientes sur le marché et leur permettre d’acquérir un avantage concurrentiel grâce à la publicité”. 

Or, les éléments fournis par Airbnb démontrent une publicité pour ses propres services et non pas une offre de service de publicité pour les tiers. 

De la même manière, dans l’affaire RTL, le Tribunal retient que les prestations proposées à des tiers impliquent une contrepartie économique. La régie publicitaire intégrée du groupe RTL remplit la définition des services de publicité sous la marque RTL. De plus, cette régie fournit ses services pour un coût spécifique, au-delà de celui de la diffusion des annonces publicitaires. 

La régie fournit les services contre rémunération et leur coût est distinct des coûts de diffusion des publicités dans les médias du groupe.

Résultat : la marque RTL demeure tandis que la marque AIRBNB est déchue pour les services de publicité. Tribunal UE, 21 mai 2025, T‑1032/23, EU:T:2025:527, Airbnb, Inc. / EUIPO – Airtasker Pty Ltd (AIRBNB) et 7 mai 2025, T‑1088/23, EU:T:2025:446, RTL Group Markenverwaltungs GmbH / EUIPO – Marcella Örtl (RTL)

Ces décisions ont le mérite de préciser au fur et à mesure la conception des prestations de services. Ainsi, les déposants peuvent affiner leur stratégie de protection de leur portefeuille de marques.

 

 

Stéphane Bellec avocat propriété intellectuelle

sbellec@debaecque-avocats.com
Tél. + 33 (0) 1 53 29 90 00

 

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