L’illustration de la référence nécessaire d’une marque dans la vie des affaires : l’affaire THERMOMIX
Il ne suffit pas d’avoir déposé une marque pour interdire à tout autre acteur du monde économique de l’utiliser. L’affaire THERMOMIX porte sur l’usage de photographies du produit alors que le visuel du produit est protégé par une marque. Le tribunal judiciaire de Paris rejette la contrefaçon de marque. L’éditeur fait une référence nécessaire à la marque protégée.
Illustrer une recette de cuisine sans montrer les ustensiles nécessaires ?
Récemment, la société VORWERK a assigné en contrefaçon la société CESAR EDITIONS pour avoir reproduit ses marques dont une marque figurative qui reproduit le robot THERMOMIX dans un magazine culinaire.
La société espagnole CESAR EDITIONS édite un magazine appelé « Mon robot et moi ». Ce magazine publie des recettes de cuisine à réaliser avec le concours de robots ménagers. C’est ainsi qu’elle a reproduit la marque de VORWERK avec l’image du robot sur la couverture des magazines, le site internet et sur les réseaux sociaux. Les visuels du robot illustrent également les recettes.
Selon la société CESAR EDITIONS, l’utilisation de ces visuels et des marques est « nécessaire pour éviter toute confusion sur le modèle concerné » afin que les consommateurs puissent savoir immédiatement s’il s’agit du modèle de robot ménager qu’ils détiennent.
La référence nécessaire à une marque, exception reconnue
Cet argument est fondé sur l’article 14 c du règlement sur la marque de l’UE ((UE) 2017/1001) retranscrit à l’article L. 713-6 du code de la propriété intellectuelle. En effet, ce fondement autorise l’utilisation des marques par des tiers pour le bon déroulé de la vie des affaires. Cela sert notamment pour désigner ou mentionner des produits ou des services comme étant ceux du titulaire.
Cette « référence nécessaire » a été définie par la Cour de justice des Communautés européennes par un arrêt du 17 mars 2005 comme étant celle «nécessaire pour indiquer la destination d’un produit commercialisé par ce tiers lorsqu’un tel usage constitue en pratique le seul moyen pour fournir au public une information compréhensible et complète sur cette destination afin de préserver le système de concurrence non faussé sur le marché de ce produit. » (aff. C-228/03, The Gillette Company, Gillette Group Finland Oy contre LA-Laboratories Ltd Oy)
Le tribunal judiciaire de Paris s’appuie sur cette définition pour décider que l’usage de la marque est réalisé « de sorte que le consommateur ne peut être induit en erreur et être amené à penser qu’il existe un lien entre le magazine de la société Cesar Editions et les sociétés Vorwerk. »
Pour rejeter la contrefaçon, le tribunal se fonde sur trois constatations :
- l’usage de la marque permet de désigner le robot et d’informer ainsi le consommateur rapidement,
- le robot Thermomix est cité au même titre que neuf autres robots,
- et l’utilisation de l’image des robots n’a pas pour but de discréditer la marque.
Les juges concluent que l’usage des marques n’excède pas un usage honnête, excluant ainsi la concurrence déloyale et le parasitisme invoqués par la société Vorwerk.
Sur le fondement de l’article 14 c) du Règlement marque de l’Union européenne, le tribunal judiciaire autorise la reproduction d’un produit même si son visuel est protégé par une marque, dans le cas où cette illustration est nécessaire pour permettre au consommateur de l’identifier clairement (Tribunal judiciaire de Paris, 19 avril 2022, N°19/07535).
Stéphane Bellec, avocat associé du Cabinet De Baecque Bellec
Avocat Propriété Intellectuelle
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