Dépôt frauduleux : La série Emily in Paris s’invite à l’INPI

L’INPI considère que le dépôt d’une marque correspondant au nom d’un personnage de la série « Emily in Paris » ne constitue pas un dépôt frauduleux. Cette décision intervient alors même que le dépôt de marque s’est produit deux mois après le lancement de la série.

dépôt frauduleux de marques

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Pierre Cadault est un créateur de mode fictif de la série « Emily in Paris ». Un particulier dépose la marque CADAULT COSMETIC en classe 3, deux mois après le lancement de la série.

Attaqué devant l’INPI (Institut National de la Propriété Industrielle), l’organisme rappelle que le demandeur doit prouver deux éléments pour revendiquer un dépôt frauduleux :

  • le titulaire de la marque contestée avait connaissance au jour du dépôt de la marque de l’usage antérieur du signe ;
  • le dépôt s’effectue dans l’intention de priver autrui d’un signe nécessaire à son activité.

La connaissance antérieure du personnage fictif

Dans sa décision du 29 avril 2024, l’INPI relève que Pierre Cadault est un personnage secondaire de la série, toujours présenté avec son nom et son prénom. Or, dans les éléments présentés, rien ne prouve que ce personnage possède une renommée telle que le grand public ait eu connaissance de ce personnage deux mois seulement après la sortie du premier épisode.

Le grand public pouvait-il associer immédiatement l’élément verbal CADAULT à ce personnage de fiction ? L’INPI en doute.

L’organisme relève que le secteur des cosmétiques a des connexions réelles avec celui de la mode. Toutefois, la Haute couture ne relève pas directement du même secteur d’activité que les cosmétiques. Certains tribunaux admettent la similarité des parfums et des vêtements, il en est autrement des cosmétiques.

Selon l’Office, il n’y a donc pas de preuve rapportée d’une connaissance antérieure du signe.

Rappelons que la fraude s’apprécie au jour du dépôt de la marque. L’INPI n’a donc pris en considération que les éléments de preuve antérieurs au dépôt. Or, de nombreuses retombées médiatiques évoquant ce personnage de la série sont postérieures.

L’intention de priver autrui d’un signe nécessaire à son activité

L’INPI se montre laconique mais juste sur le second point. Selon l’adage “fraus omnia corrumpit” (la fraude corrompt tout), un dépôt de marque peut être frauduleux s’il porte atteinte aux intérêts des tiers. Plus particulièrement, si le dépôt est réalisé dans l’intention de :

  • priver autrui d’un signe nécessaire à son activité, présente ou future,
  • s’approprier indûment le bénéfice d’une opération légitimement entreprise,
  • faire obstacle à cette opération en invoquant la marque frauduleusement enregistrée.

Le simple fait de procéder au dépôt deux mois après le lancement de la série en France n’est pas une preuve en soi. Pas plus que le fait de ne pas répondre à une mise en demeure ou de s’être trompé sur son mandataire.

En complément, le déposant n’a entrepris aucune démarche d’interdiction d’aucune sorte, après l’enregistrement de sa marque. En outre, un tel procédé serait sans doute voué à l’échec : quel argument le titulaire d’une marque de cosmétique peut-il invoquer à l’encontre d’un personnage de série ?

Il pourrait en être différemment si les producteurs décidaient de lancer des produits dérivés au nom du personnage, en particulier des produits de beauté. Mais on peut imaginer que de tels produits porteraient sans doute plutôt le nom de l’héroïne de la série, plutôt que celui d’un personnage secondaire.

En toute hypothèse, faire appel à un cabinet d’avocat en propriété intellectuelle pour vos dépôts de marques et la gestion de votre portefeuille de marques est essentiel. Ainsi, vous protégez vos droits et les défendez rapidement et efficacement.

 

Stéphane Bellec avocat propriété intellectuelle

Stéphane Bellec, associé 
Avocat Propriété Intellectuelle
sbellec@debaecque-avocats.com

Tél. + 33 (0) 1 53 29 90 00

 

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