IGP et marque : deux fondements de protection distincts et complémentaires
La cour d’appel de Rennes s’intéresse aux galettes de blé noir. L’exclusion d’un membre de l’association de défense d’une IGP ne suffit pas à lui interdire tout usage d’une marque. Le dépôt d’une marque et la protection d’une indication géographique de provenance (IGP) relèvent de deux fondements de protection distincts et autonomes.
La cour d’appel de Rennes (27 septembre 2022, 21/06317) se prononce sur la contrefaçon de la marque BLE NOIR TRADITION BRETAGNE GWINIZH DU BREIZ.
La protection de l’IGP BLE NOIR TRADITION BRETAGNE
L’association BLE NOIR TRADITION BRETAGNE est reconnue organisme de défense et de gestion de l’indication géographique protégée (IGP) protégée également à titre de marque. Elle reproche à l’un de ses anciens membres d’exploiter la marque protégée.
L’IGP Farine de blé noir de Bretagne permet d’éviter tout usage de l’indication géographique Bretagne ou Breizh sur des éléments commerciaux ou publicitaires relatifs à des farines, dès lors qu’elles ne sont pas conformes au cahier des charges de l’IGP.
Or, une société locale, exclue de l’association de défense, fait usage de visuels mentionnant “farine de blé noir de Bretagne”. Une telle utilisation contrevient à la protection de l’IGP au sens de l’article 13 du règlement n°510-2006 (relatif à la protection des indications géographiques et des appellations d’origine des produits agricoles et des denrées alimentaires).
La seule utilisation des termes caractérise suffisamment l’atteinte à l’IGP.
IGP et marques relèvent de protections différentes
En revanche, l’exclusion d’un membre de cette association ne suffit pas à caractériser la contrefaçon de marque lorsqu’il poursuit la reproduction de la marque sur ses farines et sur son site.
L’habilitation issue de la certification du cahier des charges d’une IGP est sans incidence sur le droit d’utiliser une marque. Cette habilitation impacte exclusivement l’usage de l’IGP.
De plus, en l’espèce, l’exclusion du membre de l’association a été annulée, faute de décision prise en conformité avec les statuts de l’association. Chaque membre est donc en droit d’utiliser la marque déposée par l’association. La contrefaçon est donc rejetée.
En outre, la société attaquée avait déposé une marque semi-figurative LES MONTS D’ARRÉE TRADITION BRETAGNE. L’emploi du terme Bretagne au sein d’une marque pour désigner des farines qui ne répondent pas au cahier des charges de l’IGP est interdit. La cour confirme l’annulation de la marque.
Enfin, cette société utilisait également un visuel représentant une femme en costume traditionnel avec un sac de farine et un bouquet de fleurs. Le costume en lui-même n’est pas significatif de la Bretagne. En revanche, l’ajout de la mention La Bigouden suffit à rattacher le visuel à la Bretagne. Or, la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) estime que l’évocation d’une dénomination enregistrée est susceptible d’être produite par l’emploi de signes figuratifs. Le visuel constitue par conséquent un acte de contrefaçon.
L’intérêt pour les associations de défense d’un IGP de déposer également une marque se fait en concertation avec un cabinet d’avocats spécialisé. Les deux protections relèvent de fondements distincts mais complémentaires pour la défense et la protection des indications géographiques, en France comme à l’international.
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