La protection d’un plat typique d’une région
Un député a récemment posé une question au ministre de l’agriculture sur les possibilités de protéger le « cassoulet de Castelnaudary », considérant notamment que ce nom renvoie directement à l’histoire de cette région potière, où étaient fabriquées les cassoles. Qu’en est-il des possibilités de protection d’un plat régional ?
A titre liminaire, il est constant que les recettes ne peuvent bénéficier en tant que telles de la protection des droits d’auteur. Il a été jugé que « si les recettes de cuisine peuvent être protégées dans leur expression littéraire, elles ne constituent pas en elles-mêmes une œuvre de l’esprit, qu’elles s’analysent en effet en une succession d’instructions, une méthode ; il s’agit d’un savoir-faire, lequel n’est pas protégeable » (1)
La spécialité traditionnelle garantie : une protection mal connue
Une première piste possible serait l’enregistrement du cassoulet de Castelnaudary en tant que spécialité traditionnelle garantie (STG). Cette protection mal connue vise à protéger une méthode de production ou une recette. Toutefois, la STG fait référence à la composition d’un produit, à son mode de production ou de transformation effectué de manière traditionnelle, mais ne garantit pas le lien à l’origine géographique du produit.
Ainsi, à supposer que le cassoulet de Castelnaudary bénéficierait d’une STG, cela n’empêcherait pas qu’il puisse être réalisé en dehors du pays ou de la région d’origine. Au sein de l’Union européenne, 55 produits bénéficient actuellement du label « spécialité traditionnelle garantie », dont seulement deux en France. (2)
Cette protection n’est pas conforme au souhait des producteurs locaux, qui souhaitent précisément garantir le cassoulet provenant de la région de Castelnaudary.
Indication géographique protégée et plat cuisiné
Une première piste de protection pourrait être l’indication géographique protégée (« IGP »), qui identifie un produit agricole, brut ou transformé, dont la qualité, la réputation ou d’autres caractéristiques sont liées à son origine géographique. Si l’IGP permet à tout opérateur situé dans l’aire géographique et respectant le cahier des charges d’une IGP d’en bénéficier, il n’est pas possible de reconnaitre une IGP à un plat cuisiné. Ainsi, l’aligot de l’Aubrac s’était vu opposer un refus pour protéger son plat avec une IGP sur ce fondement. Partant, le cassoulet de Castelnaudary ne peut donc pas être protégé par une IGP.
In fine, il reste une possibilité pour garantir le lien avec la région de Castelnaudary pour le cassoulet produit dans cette région : demander la protection des ingrédients constitutifs de ce plat avec des IGP, à condition que leur qualité, leur réputation ou d’autres caractéristiques soient liés à leur origine géographique. (3) Cela est notamment le cas du haricot de Castelnaudary, matière première du cassoulet, enregistré en tant qu’IGP depuis 2020. (4)
Tél. + 33 (0) 1 53 29 90 00
(1 )TGI Paris, 3e chambre, 30 septembre 1997, Duribreux c/ Muses Production. V. PIRREDA, « La cuisine mettrait- elle les pieds dans notre P.L.A ? », RIDA, n°177, 1998, p. 273.
(3) Communication de la Commission — Lignes directrices sur l’étiquetage des denrées alimentaires utilisant des appellations d’origine protégées (AOP) et des indications géographiques protégées (IGP) comme ingrédients 2010/C 341/03