La Commission européenne veut optimiser la protection des indications géographiques dans la sphère numérique

Le 10 novembre 2025, la Commission européenne a publié son rapport d’analyse pour un meilleur encadrement de l’enregistrement des noms de domaine dans le cadre de la protection des indications géographiques protégées industrielles et artisanales (IGPIA).

Ce rapport porte sur la faisabilité d’un système d’information mis en place par l’EUIPO, l’Office européen des marques, et fondé sur des outils accessibles au public permettant d’établir une surveillance proactive de l’enregistrement de noms de domaine potentiellement frauduleux à l’échelle européenne. 

avocat marque contrefacon

Cybersquattage : une préoccupation majeure

Dans un contexte de renforcement général de la protection des droits de propriété intellectuelle en ligne, la Commission met en lumière un besoin de coordination dans le secteur des indications géographiques. 

Il y a en effet un nombre croissant d’enregistrements frauduleux de noms de domaine. La Commission alerte également sur la pratique du cybersquattage, illustration de l’utilisation abusive des indications géographiques artisanales et industrielles.

Le cybersquattage est défini dans le rapport comme l’enregistrement ou l’utilisation d’un nom de domaine au point de prêter confusion avec une dénomination protégée, telle qu’une indication géographique protégée (IGP), dans l’intention de tirer indûment profit de sa réputation, d’induire les consommateurs en erreur ou de revendre le nom de domaine à des fins lucratives.

Le secteur des indications géographiques est considéré par la Commission comme étant particulièrement sensible à ces enregistrements frauduleux. Elle souligne dans son rapport que les producteurs des IGP disposent généralement de peu de ressources et de moyens de veille pour établir une surveillance de dépôts de noms de domaine frauduleux. 

A cet égard, elle précise que les moyens d’action des producteurs des indications géographiques sont obstrués par l’impossibilité d’établir une surveillance systématique, et des procédures coûteuses et complexes. Le rapport propose une mise en place technique de cette surveillance.

Un phénomène endémique face à une jurisprudence marginale

Le faible contentieux impliquant ces enregistrements frauduleux n’est pas forcément représentatif du phénomène qui touche un grand nombre d’indications géographiques.

Or, cela s’explique, comme le souligne le rapport, par ce manque de moyen et cette surveillance fragile des dépôts frauduleux par les représentants des indications géographiques.

En France, la jurisprudence s’en saisi progressivement, l’une des premières décisions impliquant une atteinte à une indication géographique pour les produits industriels et artisanaux par un nom de domaine date de 2022, dans l’affaire Pierre de Bourgogne (TJ Paris, 8 février 2022, n°20/03912). 

L’association ayant pour objet la défense de cette indication géographique reprochait à un tiers non autorisé l’enregistrement de noms de domaine éponymes. Le Tribunal judiciaire de Paris a considéré que l’opérateur n’était en effet pas habilité à se prévaloir de cette indication géographique.

Dès lors, l’utilisation commerciale de la dénomination par l’enregistrement des noms de domaine tirait effectivement indûment profit de la réputation de l’IGP protégée.

Reste donc à savoir si l’issue de ce rapport du 10 novembre 2025 établira des outils pratiques efficaces contre les enregistrements frauduleux des noms de domaine, et permettra endiguer l’atteinte portée par cette pratique aux indications géographiques industrielle et artisanales.

Stéphane Bellec avocat propriété intellectuelle

Stéphane Bellec, associé 
Avocat Propriété Intellectuelle

avec Laura BEAUSSART, stagiaire élève avocate

sbellec@debaecque-avocats.com
Tél. + 33 (0) 1 53 29 90 00