L’usage d’une marque dans la vie des affaires syndicales !
SUJET : DROIT DES MARQUES – La cour d’appel d’Aix se prononce sur la notion d’usage dans la vie des affaires pour une marque enregistrée par un syndicat. La frontière avec l’usage dans un domaine privé est mince et se construit au fil des décisions des tribunaux. Dans une affaire de marques de syndicats, comment interpréter cette notion d’usage d’une marque dans la vie des affaires ?
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Dans quel contexte l’usage d’une marque d’un syndicat est-il reproché?
L’union nationale des syndicats autonomes (UNSA) est titulaire d’une marque semi-figurative UNSA LIBRES ENSEMBLE. Des particuliers, puis le syndicat OSEDI, exploitent les termes UNSA PDS. Ils utilisent le nom notamment sur des bulletins d’adhésion et envoient une attestation à la sécurité sociale reproduisant la l’élément UNSA de la marque enregistrée.
Le 13 octobre 2016, le tribunal de grande instance de Marseille les condamne pour contrefaçon de marque et contrefaçon de droit d’auteur. Mais ils interjettent appel de cette décision. La cour d’appel d’Aix confirme alors la première décision le 23 mai 2019.
L’usage d’une marque dans la vie des affaires, appliqué à un syndicat
L’usage d’une marque au sens de l’article L 713-2 du code de la propriété intellectuelle doit s’interpréter à la lumière de l’article 5 de la directive CE 2008/95 comme un usage dans la vie des affaires. A l’opposé d’un usage dans le domaine privé, la vie des affaires implique une activité commerciale ou toute activité produisant pour l’argent un avantage économique, direct ou indirect.
Cette notion d’usage dans la vie des affaires est très souvent rappelée par les tribunaux dans des cas d’utilisation purement commerciale, depuis que la cour de justice des communautés européennes en a défini les contours dans l’arrêt ARSENAL. Une application à un syndicat professionnel est plus rare.
La cour d’appel d’Aix considère en l’espèce, qu’un syndicat « recueillant des cotisations ou assistant un salarié dans une démarche, perçoit des ressources et offre des prestations qui pourraient être assurées par des organisations concurrentes. » Elle valide ainsi l’usage dans la vie des affaires. Les actes d’imitation relevés entraînaient en outre un risque de confusion, alors même que les deux syndicats exercent des services similaires. La contrefaçon de marque est donc retenue.
Les tribunaux français se sont déjà prononcés sur l’usage d’une marque dans la vie des affaires par un syndicat. La frontière fragile entre usage privé et vie des affaires conduit à décisions disparates. Ainsi, l’utilisation d’une marque d’un syndicat dans le titre d’une publication n’est pas réalisé dans la vie des affaires (Cour de cassation, 10 mai 2011) contrairement à une utilisation sur des flyers et pour référencer un site web (TGI Paris, 6 avril 2018).
Même si l’on considère que l’objectif premier d’un syndicat est la défense des intérêts des salariés, son fonctionnement nécessite de générer des cotisations. Utiliser la marque d’un syndicat peut donc permettre d’obtenir des revenus en suscitant l’adhésion des salariés.
Syndicats, associations, fondations ou groupements doivent donc être vigilants sur l’utilisation des marques et la protection de leurs noms. L’usage dans la vie des affaires reste une notion très délicate, appréciée différemment selon les tribunaux.
Stéphane Bellec, avocat associé du Cabinet De Baecque, Fauré, Bellec
Avocat Propriété Intellectuelle
Tél. + 33 (0) 1 53 29 90 00
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