Comment optimiser vos actions en contrefaçon de marques ?

Le Journal du Management publie un article de notre associé Stéphane Bellec consacré aux actions en contrefaçon de marques. Nous détaillons la manière d’utiliser les récentes jurisprudences pour lutter efficacement contre la contrefaçon, notamment en agissant contre les intermédiaires. Retrouvez notre article dans l’édition spéciale du Journal du Management juridique consacré au droit des nouvelles technologies, de la propriété intellectuelle et du RGPD. 

comment optimiser les actions en contrefaçon de marques

Au sein des directions juridiques, la défense des intérêts de l’entreprise répond à un souci d’efficacité. Ainsi, dans la lutte contre la contrefaçon, la seule décision importante est de régler définitivement le problème de circulation de produits contrefaits. Les tribunaux, à travers plusieurs décisions récentes, ont permis la condamnation d’intermédiaires et d’acteurs économiques en lien avec des contrefacteurs. Dans un contexte économique mondialisé et digitalisé, vous gagnerez en efficacité dans votre lutte contre la contrefaçon en attaquant toutes les bonnes personnes pour parvenir à faire cesser les atteintes contre vos marques.

Agir en contrefaçon contre le propriétaire

Pour lutter contre la contrefaçon de marques, il est préférable d’élargir l’action judiciaire à tous les acteurs économiques gravitant autour du contrefacteur.

Le tribunal de grande instance de Paris, statuant en référé, le 18 novembre 2019 reconnaît l’existence d’atteintes vraisemblables à des marques connues vendues sur un stand des Puces de Saint-Ouen. Il condamne non seulement le commerçant exploitant le stand sous astreinte à cesser tout acte de contrefaçon mais aussi le propriétaire du stand. Ainsi ce dernier doit “justifier de la prise de toute mesure utile à l’encontre de son locataire propre à empêcher la poursuite des actes argués de contrefaçon”.

Les juges exploitent à bon escient l’article L 716-6 du Code de la propriété intellectuelle qui prévoit : « Toute personne ayant qualité pour agir en contrefaçon peut saisir en référé la juridiction civile compétente afin de voir ordonner, au besoin sous astreinte, à l’encontre du prétendu contrefacteur ou des intermédiaires dont il utilise les services, toute mesure destinée à prévenir une atteinte imminente aux droits conférés par le titre ou à empêcher la poursuite d’actes argués de contrefaçon”.

Cet article doit être interprété à la lumière des textes et de la jurisprudence européens. Or, la Cour de Justice de l’Union européenne a déjà qualifié un propriétaire d’intermédiaire :

  • dans le cas d’une place de marché en ligne (CJUE, 12 juillet 2011, L’ORÉAL)
  • dans le cas d’une place de marché physique (CJUE, 12 juillet 2016, TOMMY HILFIGER).

 

Agir contre le logisticien

Plus récemment encore, la Cour de Justice de l’Union européenne a répondu à une question préjudicielle concernant la responsabilité d’Amazon (CJUE, 2 avril 2020, COTY / AMAZON) : “le simple entreposage par une entreprise pour le compte d’un vendeur tiers de produits portant atteinte à un droit de marque ne constitue pas un usage à titre de marque”.

Nous déplorons que la cour allemande n’ait pas posé de question préjudicielle concernant la responsabilité en qualité d’intermédiaire de la Marketplace. Il faudra donc encore attendre pour connaître la position européenne. Toutefois, la position de l’avocat général M. MANUEL CAMPOS SÁNCHEZ-BORDONA était audacieuse et pertinente. Il affirmait ainsi que l’entreprise américaine, dans le cadre de son programme “expédié par Amazon s’impliquait activement dans la distribution de produits contrefaits. Conformément à l’article 14, paragraphe 1, de la directive N°2000/31 (relatif aux dérogations en matière de responsabilité des prestataires de services intermédiaires), une telle entreprise devrait donc faire preuve de diligence en matière de contrôle de licéité des marchandises.

La cour a d’ailleurs précisé dans son communiqué que “d’autres dispositions du droit de l’Union, notamment celles relatives au commerce électronique et au respect des droits de propriété intellectuelle, permettent d’agir en justice contre un intermédiaire qui a permis à un opérateur économique de faire illégalement usage d’une marque”. Le débat est donc loin d’être clos !

Cette position est liée non seulement au rôle logistique d’Amazon mais également à son rôle de marketplace. Cette double casquette lui donnerait ainsi une part active dans la facilitation de la distribution de produits contrefaits en mettant à disposition de contrefacteurs ses services de commercialisation, de paiement, de logistique et d’expédition. Il y va également de la réputation et de la rentabilité d’Amazon qui a admis que la croissance du nombre de contrefaçons sur son site devenait un fléau. A tel point que la société développe des solutions, comme le programme ProjectZéro pour lutter contre la contrefaçon.

Agir contre les fournisseurs d’accès à internet (FAI)

C’est sur la base de la LCEN (loi N°2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique) que le Tribunal judiciaire de Paris a stoppé la diffusion de sites commercialisant des produits contrefaits (décision du 8 janvier 2020).

Faute de mentions légales et d’informations sur le propriétaire du site et du nom de domaine, les sociétés titulaires des marques contrefaites ont poursuivi les FAI pour bloquer en France l’accès aux sites incriminés. C’est une application inédite de la LCEN en droit des marques.

Les conditions d’application sont vérifiées :

  • existence d’un trouble manifestement illicite ;
  • preuve de la contrefaçon de marques par un constat d’huissier ;
  • impossibilité d’agir contre l’éditeur et l’hébergeur.

Par conséquent, le tribunal ordonne aux quatre principaux FAI d’interdire sous 15 jours et pour 12 mois, l’accès depuis la France aux sites.

Pour lutter contre la contrefaçon, adoptez les pratiques efficaces au sein d’une économie mondialisée et digitalisée.

 

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