Importance de l’usage d’un nom de domaine, d’un nom commercial ou d’une dénomination sociale 

La réforme du droit des marques en 2019 a élargi les droits antérieurs que l’on peut invoquer à l’appui d’une procédure d’opposition ou d’une action en nullité. Nom de domaine, dénomination sociale et nom commercial font désormais partie des droits que leur propriétaire peut invoquer devant l’INPI. La preuve de l’usage du droit antérieur sera au cœur de la procédure. Ainsi, dans une récente décision, l’INPI a rejeté une action en nullité, faute de preuve d’usage antérieure à la date de dépôt de la marque contestée. 

preuve d'usage nom commercial

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Quelles preuves d’usage d’un nom commercial, d’une dénomination sociale ou d’un nom de domaine ?

La décision de l’INPI, en date du 7 octobre 2024 (NL 23-0255) montre l’importance de collecter régulièrement des preuves d’usage datées. Elle est l’une des rares décisions de l’INPI dans laquelle des droits antérieurs autres qu’une marque sont invoqués. Ce qui en fait son intérêt. 

 

En l’espèce, une société LPB exerce sous le nom LES PETITES BOMBES une activité de prêt-à-porter. Une marque LES PETITES BOMBES LPB fait l’objet d’un dépôt en classes 3 (parfums et cosmétiques), 9 (lunettes) et 14 (montres et bijoux). La société LPB forme une demande en nullité contre cette marque sur un triple fondement : la dénomination sociale LPB, le nom commercial LES PETITES BOMBES et le nom de domaine associé.

Usage d’une dénomination sociale 

La dénomination sociale bénéficie d’une protection pour les activités effectivement exercées par la société parmi celles énumérées dans l’objet social de ses statuts.

En complément, le seuil de l’exploitation d’une dénomination sociale est relativement faible, tout comme son envergure nationale. En l’espèce, l’INPI accepte une coupure de presse unique datant de plus de 5 ans avant le dépôt de la marque. 

En revanche, l’INPI exige que le demandeur démontre la similitude entre les produits contestés et les activités pour lesquelles la dénomination sociale est invoquée. Ici, l’article de presse prouve l’exploitation de la dénomination sociale pour une ligne de prêt à porter. Or, le demandeur n’a pas fait l’effort de démontrer la similarité avec les cosmétiques, lunettes ou montres.  

Faute de quoi, l’INPI refuse de se substituer au demandeur et d’analyser le risque de confusion éventuel dans l’esprit du public. 

Usage d’un nom commercial

L’INPI attend ici la démonstration d’un usage significatif effectif dans la vie des affaires pour les activités invoquées. On sait que la protection d’un nom commercial naît de son usage et perdure en cas d’utilisation permanente et stable (voir la décision PUBLICIS ET NOUS sur l’usage constant dans la vie des affaires). 

Le seul fait de montrer un usage effectif en France est insuffisant, s’il n’atteint pas un seuil significatif pour démontrer une portée non seulement locale antérieure du dépôt contesté (article L 711-3 du Code de la propriété intellectuelle). En l’espèce, le demandeur n’apporte pas la preuve d’une connaissance sur l’ensemble du territoire au jour du dépôt de la marque.  

L’INPI passe d’une portée non seulement locale à une connaissance sur l’ensemble du territoire. Ce point méritera des précisions dans les prochaines décisions. 

Usage d’un nom de domaine

Enfin, concernant le nom de domaine, l’INPI attend une preuve d’exploitation antérieure au dépôt de marque. En outre, l’office exige une preuve de sa connaissance sur l’ensemble du territoire à cette date

L’enregistrement du nom de domaine auprès d’un bureau d’enregistrement comme l’Afnic, ne démontre pas un quelconque usage. La portée du nom de domaine a déjà fait l’objet de plusieurs décisions comme dans l’affaire KAPITZ. 

Quelques conseils pour les preuves d’usage

Le rejet de la demande de nullité par l’INPI apporte des précisions précieuses pour constituer des dossiers de preuve d’usage : 

  • présenter des preuves d’usage antérieures à la date de dépôt de la marque contestée ; 
  • fournir des documents de bonne qualité, datés et précis quant aux produits exploités ;
  • pour invoquer un nom commercial ou un nom de domaine, relever des preuves d’usage dans plusieurs régions de France ; 
  • conserver au fur et à mesure les preuves d’usage datées telles que catalogues, publicités, factures, enregistrement de pages web et chiffres relatifs à la fréquentation du site et à la répartition géographique des visiteurs.   

 

Stéphane Bellec avocat propriété intellectuelle

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