Donner c’est donner : la requalification d’une donation en présent d’usage

La Cour d’appel de Caen a procédé à la requalification d’une donation d’une tapisserie faite par un époux à sa femme en présent d’usage, en empêchant toute révocation de la donation (CA Caen, 23 mars 2021, n°19/00891).

A l’occasion de leur 10ème anniversaire de mariage, un époux a fait donation à sa femme d’une tapisserie gothique. Le couple s’est séparé et l’épouse a emporté la tapisserie hors du domicile pour la mettre en vente. Le mari a assigné son épouse en paiement du prix de vente qui était conséquent.

Le présent d’usage est un présent offert à un évènement spécial (un cadeau d’anniversaire par exemple). L’article 852 du Code civil dispose que les présents d’usage « ne doivent pas être rapportés, sauf volonté contraire du disposant ». La qualification en présent d’usage s’apprécie au moment de la remise et selon la fortune du disposant, puisqu’il s’agit d’un cadeau. L’intention libérale doit également être démontrée.

Le mari soutenait à titre principal que la donation de la tapisserie n’était pas établie et à titre subsidiaire qu‘il n’y avait pas présent d’usage. La décision est intéressante par les critères qu’elle analyse pour déterminer qu’il s’agit d’un présent d’usage. En effet, il ressortait d’une attestation écrite par l’époux et corroborée par une attestation de propriété notariée ainsi que des témoignages que la tapisserie avait été donnée à titre de présent d’usage.

Afin de qualifier le présent d’usage, les juges ont pris en compte l’estimation du présent et non son prix d’adjudication. Ils ont ensuite vérifié que ce montant était proportionné à la fortune du mari qui disposait d’une collection d’œuvres d’art valorisée à hauteur de 6 millions d’euros, sans compter les revenus mobiliers.

La Cour d’appel conclut à la qualification de présent d’usage, ce qui implique que l’époux, malgré le divorce, ne pouvait révoquer sa donation et donc toucher le prix de vente de la tapisser

Olivier De Baecque avocat droit de l'art

Olivier DE BAECQUE, associé
Avocat droit de l’art

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