La similarité des signes en droits des marques : l’affaire SOHO
Le tribunal de l’Union européenne s’est intéressé au caractère distinctif du terme SOHO. Ce nom donné à un quartier de Londres et de New-York peut-il constituer une marque valide pour des boissons alcoolisées ? Indique-t-il nécessairement l’origine des produits ? Comment s’apprécie la similarité des signes en droit des marques ?
Une société anglaise dépose une marque semi-figurative THE KING OF SOHO. La société Pernod Ricard s’oppose à l’enregistrement sur la base de sa marque antérieure verbale SOHO. Elle exploite la marque pour divers produits alcoolisés en classes 32 et 33.
L’EUIPO (Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle) accueille l’opposition et refuse l’enregistrement sur la base de la marque antérieure. L’affaire est alors portée devant le Tribunal de l’Union européenne qui confirme le refus d’enregistrement de la marque, dans une décision du 28 avril 2021.
L’analyse du tribunal sur la comparaison des signes est intéressante, d’autant plus que l’argumentation du déposant pouvait sembler pertinente.
La comparaison des éléments distinctifs des marques
En premier lieu, le tribunal confirme que l’élément verbal SOHO est dominant dans les deux signes en cause. Les différences de couleurs et de police de caractères ne suffisent pas à ôter ce caractère dominant.
Le déposant contestait ce point, arguant que les éléments “THE KING OF” étaient distinctifs, l’élément SOHO décrivant une caractéristique du produit.
À cet argument, le tribunal répond que les termes “the king of” dans le secteur publicitaire constituent des termes laudatifs et donc faiblement distinctifs.
L’origine géographique de SOHO pour des alcools
Le second point de l’argumentation réside dans le fait que le terme SOHO indique une provenance géographique.
Pour le demandeur, SOHO n’est pas un élément distinctif puisqu’il désigne des quartiers de Londres et de New-York, connus pour leurs activités nocturnes et festives. Il serait donc immédiatement associé au fait de boire de l’alcool et, par conséquent, serait descriptif des produits désignés au dépôt.
Le tribunal ne suit pas cet argument : le nom d’un quartier, même connu pour ses bars, n’est pas transposable aux produits servis dans ces établissements. Aucun élément ne permet d’associer ces quartiers à des lieux de production d’alcool. Par conséquent, le terme SOHO n’indique pas la provenance géographique des produits visés au dépôt, pas plus que ceux de la marque antérieure.
Le tribunal confirme la décision de la chambre des recours. En raison de la similitude des produits et de la similitude des signes, il existe entre les deux marques un risque de confusion dans l’esprit du public pertinent.
Stéphane Bellec, avocat associé du Cabinet De Baecque Bellec
Avocat Propriété Intellectuelle
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